La famille en 5 temps
Cette semaine sur ONF.ca, on se concentre sur la famille, un concept aussi essentiel qu’élastique. À bien des égards, la famille relève de la première interaction sociale, elle reflète notre premier rapport avec le monde au-delà de notre enveloppe corporelle. Les documentaires qui suivent captent la complexité de ce phénomène universel, entre l’entraide et le déchirement, la célébration du sublime et l’expérience commune de la douleur.
La perte d’un membre de la famille
La douleur, justement, se vit au quotidien pour les Enfants de soldats. Dans ce documentaire particulièrement franc, des familles de soldats doivent vivre le quotidien dans l’attente continue de nouvelles de bien-aimés déployés en Afghanistan. Parfois, ces nouvelles sont joyeuses, porteuses de réunions anticipées, parfois, elles sont tout à fait tragiques, et pour certains, le retour ne représente aucunement l’arrivée soudaine du bonheur; quelque chose a transformé les hommes partis au combat, et les enfants et les épouses ne reconnaissent pas toujours le mari ou le père qu’ils côtoyaient quotidiennement avant le déploiement. À voir pour les témoignages déchirants d’enfants un peu obligés de grandir trop vite, des débats et des questionnements concernant la nature même d’une mission militaire, et les moments de partage et de tendresse en famille, à l’importance décuplée considérant la menace qui ne cesse jamais carrément de planer sur la présence continue d’un être aimé.
Enfants de soldats, Claire Corriveau, offert par l’Office national du film du Canada
Les êtres aimés qui quittent ne le font pas toujours pour servir leur pays. Entre l’arbre et l’écorce capte assez bien la complexité des liens familiaux en créant un document singulier, mêlant le documentaire à base d’archives, le mythe, l’animation, la mise en scène et le témoignage. Jeffrey St-Jules tente de retourner dans le passé pour comprendre l’histoire de ses parents et ses grands-parents, une histoire marquée par l’abandon prématuré d’enfants, l’irresponsabilité, l’alcool et la recherche continue du travail. Le film est présenté en trois parties distinctes, et la troisième partie m’a particulièrement plu : le cinéaste interviewe des individus ayant abandonné leurs enfants et leurs familles, pour toutes sortes de raisons. Un regard sans jugement sur un phénomène particulièrement tabou, on voit que si l’injustice peut pencher d’un bord plus que d’un autre, la douleur, elle, peut être distribuée équitablement entre tous.
Entre l’arbre et l’écorce, Jeffrey St. Jules, offert par l’Office national du film du Canada
Le travail en famille
Bon, là on vient de parler de séparation pas mal, mais on vous suggère également des films qui s’intéressent à l’unité familiale en pleine action, c’est à dire, au travail. Ici, deux phénomènes différents, mais avec leurs lots de similarités. Dans le documentaire interactif Ying Jia, Dépanneur de la petite-patrie, la journaliste Judith Lussier et la photographe Dominique Lafond, en collaboration avec l’ONF et Le Devoir, captent le quotidien de la famille Lu, arrivée de la Chine il y a six ans, et depuis propriétaire d’un dépanneur. L’appartenance au Canada y est abordée, le rapport avec la langue, et les rêves de Ying Ying, l’adolescente dont les ambitions personnelles semblent se trouver en discordance avec les ambitions de la mère pour l’avenir professionnel de sa fille. Photo-reportage percutant sur une réalité parfois méconnue.
Explorez ce documentaire interactif
Alors que les Lu se sont installés pour ouvrir un dépanneur, dans Une affaire de famille, Nicole et Flavien constatent avec philosophie que leur magasin général à Pointe-Verte, au Nouveau-Brunswick, ne se porte pas si bien, en grande partie à cause de l’exode qui amincit la population déjà menue de la région. Leur fils est en plein apprentissage, ses maladresses s’additionnent alors que l’expertise accumulée par les années de travail de la mère créé un contraste frappant avec sa progéniture. Avec un ton informel et honnête, elle tente d’éduquer et d’entraîner son fils, alors que ses intérêts peuvent être ailleurs et que l’entreprise familiale semble inévitablement vouée à une fin imminente.
Une affaire de famille, Justin Guitard, offert par l’Office national du film du Canada
Les doyens de la famille
Finalement, on lève notre verre à Aldéa, vedette touchante du documentaire Un dimanche à 105 ans, qui nous a quitté à l’âge vénérable de 112 ans et 8 mois en 2014. Le réalisateur Daniel Léger s’intéresse à la vie et au quotidien de son arrière-grand-mère, qu’il interviewe par un beau dimanche. C’est un hommage révélateur et touchant, s’intéressant à l’identité éclairante de cette aînée qui se permet, avant chaque sommeil, un petit coup de fort. À la vôtre, Aldéa!
Un dimanche à 105 ans, Daniel Léger, offert par l’Office national du film du Canada