Trois suggestions pour célébrer le Mois de l’histoire des Noirs | Perspective du conservateur
Depuis une bonne dizaine d’années maintenant, l’ONF souligne, en février, le Mois de l’histoire des Noirs, en vous proposant une programmation spéciale sur son site. La chaîne Les voix des communautés noires au cinéma compte une trentaine de films. Mais par où commencer ? Voici trois suggestions.
Rythmes et résistance : le voyage du reggae au Canada (2024)
Cette fascinante série documentaire en cinq épisodes de Graeme Mathieson et Chris Flanagan lève le voile sur un aspect méconnu de l’histoire de la musique au Canada. Tout le monde sait que le reggae est né en Jamaïque aux débuts des années 1960, mais peu de gens savent qu’il a pris racine et s’est épanoui au Canada dans les années 1970, alors que certains des plus grands artistes de ce courant musical sont venus s’installer dans le quartier Eglinton de Toronto. Les cinéastes retracent le parcours de Roy Panton et Yvonne Harrison, célèbre duo de ska, de la chanteuse Nana McLean, reine incontestée du reggae au Canada, du chanteur Johnny Osbourne, véritable parrain du dancehall, un genre musical et un style de danse qui trouve ses racines dans le reggae, du chanteur et musicien Leroy Sibbles, dont les lignes de base ont fait de lui un géant du reggae, et de Jerry Brown, fondateur du célèbre studio d’enregistrement Summer Records, qui fut l’un des premiers à produire de la musique reggae au Canada. Les entrevues, les images d’archives, les scènes de reconstitution et la musique (bien entendu) font de cette série un petit bijou que vous prendrez plaisir à voir même si vous n’êtes pas un amateur de reggae.
Roy & Yvonne, Graeme Mathieson et Chris Flanagan, offert par l’Office national du film du Canada
Par vents et marées (2022)
Ce film d’animation de Bogdan Anifrani-Fedach est issu d’Alambic, le programme de mentorat professionnel de notre unité d’animation francophone, qui donne l’occasion à des cinéastes de la relève de réaliser un court métrage de moins de trois minutes. Ce film expérimental alliant narration minimaliste, animation à l’ordinateur et animation sous la caméra illustre de brillante façon comment une idée se forme dans l’inconscient, puis comment elle se libère. Ce premier opus à l’ONF du cinéaste d’origine togolaise et ukrainienne, qui a déjà trois autres réalisations à son actif, est un véritable tour de force. Un film envoûtant, hypnotisant, qui a remporté le prix Silver Experimental au Festival de l’animation de Los Angeles en 2022.
Par vents et marées, Bogdan Anifrani-Fedach, offert par l’Office national du film du Canada
Kenbe la, jusqu’à la victoire (2019)
Ce long métrage documentaire de Will Prosper est d’abord et avant tout l’histoire d’une amitié, celle entre le cinéaste et le protagoniste de son film, l’artiste et militant Alain Philoctète. Les deux hommes partagent les mêmes racines culturelles, le même pays d’origine, Haïti, mais aussi les mêmes préoccupations sociales, les mêmes combats. C’est d’ailleurs lors d’un événement militant qu’ils se croisent pour la première fois. Au fil de leurs rencontres, une idée germe dans l’esprit du cinéaste : réaliser un documentaire sur son ami. Son titre, il l’a déjà, car Alain n’a de cesse de lui répéter quand ils se quittent : kenbe la, pa molli (n’abandonne jamais, tiens bon). Prosper y voit « un appel tranquille, mais ô combien inlassable, à lutter jusqu’à la victoire[1] ».
Kenbe la, jusqu’à la victoire, Will Prosper, offert par l’Office national du film du Canada
Le documentariste mettra en lumière les combats de son ami dans son film. Ceux du passé, en Haïti, alors qu’Alain réclame à l’époque, avec ses amis et compagnons de lutte, un accès à la terre et le droit à un travail digne pour les paysans. Des revendications qui lui valent d’ailleurs des persécutions et le contraignent à s’exiler au Québec. Ceux du présent, tandis qu’Alain retourne en Haïti afin de mettre sur pied un projet de permaculture avec les paysans de sa région natale, alors qu’il se sait atteint d’un cancer. Kenbe la, jusqu’à la victoire est un film inspirant, le portrait d’un homme humble, rêveur (dans le bon sens du mot), porté par des valeurs profondes de partage, de solidarité et de dignité du travail. En 2019, il a reçu le prix du public aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal.
À ne pas manquer également sur onf.ca, dès le 7 mars, Une mère à part, le tout nouveau long métrage documentaire de Laurie Townshend.
Une mère à part, Laurie Townshend, offert par l’Office national du film du Canada
Découvrez notre chaîne Les voix des communautés noires au cinéma.
[1] Citation tirée du mot du réalisateur, dossier de presse du film Kenbe la, jusqu’à la victoire, onf.ca.