Notre univers, six décennies de découvertes scientifiques plus tard
Comment se représentait-on l’Univers avant qu’il ne soit observé ? Notre univers répond à cette question en nous montrant l’« immontrable » en 1960 : planètes vues de leurs lunes et leur surface, astéroïdes tournoyants et mouvements des galaxies.
En regardant ce film, nous retrouvons une vision de l’espace et du monde antérieure à la conquête spatiale, à la fois étrange et familière.
Notre univers , Roman Kroitor et Colin Low, offert par l’Office national du film du Canada
Six décennies de recherches scientifiques ont bouleversé notre compréhension du monde et exposé des erreurs dans nos connaissances que personne en 1960 n’aurait pu repérer. Le développement des programmes spatiaux d’exploration et l’avènement de nouvelles technologies d’observation mettent en lumière des failles dans le savoir datant de l’époque de Notre univers. Les incroyables avancées de la science astronomique des dernières décennies nous amènent aussi à nous poser les questions suivantes : dans soixante ans, quelles connaissances d’aujourd’hui se révéleront être une erreur de parcours ? Quelles nouvelles limites seront repoussées par le progrès astronomique ?
Les grands explorateurs
Au moment de l’écriture de Notre univers, l’humanité en est au tout début de l’exploration spatiale. Ce n’est qu’en 1961 que Youri Gagarine devient le premier être humain à aller en orbite. Quatre ans plus tard, l’humanité reçoit ses premières images d’une planète vue de l’espace grâce à la sonde Mariner 4. Les missions qui suivent nous en apprennent énormément sur les autres corps de notre système solaire et transforment nos idées préconçues sur les autres planètes. Lorsqu’on regarde Notre univers, un peu de pensée critique suffit pour repérer ces erreurs et les expliquer. Elles sont le résultat de moyens technologiques bien différents des nôtres.
« À quatre fois la distance de la Terre au Soleil gravite Jupiter, que son nom désigne comme la plus olympienne des planètes. Le maître des dieux a, comme il se doit, une douzaine de satellites […]. » — Citation extraite du film
Notre univers sous-estime la distance entre le Soleil et Jupiter de 20 %, et nous comptons maintenant à cette planète plus de 80 satellites.
Les sondes spatiales nous apportent un savoir inaccessible de la Terre, comme le démontrent Viking Lander 1 et Viking Lander 2. Après les études biologiques de ces deux sondes à la surface de Mars, il devient évident que la planète rouge n’est pas habitée par une vie intelligente ou encore couverte de végétation. Jusqu’au début du vingtième siècle, il est encore considéré comme probable que la vie abonde dans le système solaire. L’étude des planètes nous porte à prendre conscience de notre solitude absolue, du moins à proximité du Soleil. Notre incapacité à nous trouver des frères et sœurs parmi les astres est un excellent exemple de la manière dont la science a su transformer notre vision de nous-mêmes.
De nouveaux yeux pour la Terre
De 1960 à 2020, la taille du plus gros télescope au monde double, passant de 5,08 mètres (télescope Hale du mont Palomar) à 10,4 mètres (Grand Télescope des îles Canaries). Un rapide calcul d’aire nous indique qu’en doublant le rayon d’un télescope, on quadruple sa capacité à recevoir de la lumière. Cependant, ce n’est pas par la taille de nos télescopes que notre pouvoir d’observation du cosmos s’est le plus accru. La recherche astronomique s’est numérisée, et l’utilisation de capteurs électroniques plutôt que de plaques photographiques donne même à nos petits télescopes d’aujourd’hui une chance de rivaliser avec les grands télescopes du passé.
« Embrassant d’un seul coup d’œil le spectacle de l’Univers, nous discernerions des continents d’astres, des archipels d’étoiles, et nous les nommerions galaxies. Dans la mer des ténèbres, ce sont là les formes simples les plus vastes que nous connaissions de l’Univers. » — Citation extraite du film
Les télescopes et les techniques modernes nous ont permis de changer profondément notre compréhension de l’espace. Ils sont si performants que nous pouvons même voir et étudier des planètes en dehors de notre système solaire. Nos nouveaux télescopes nous dévoilent les détails de notre propre galaxie et ouvrent notre horizon jusqu’aux premières lueurs qui ont suivi le Big Bang. Alors que Notre univers présente les galaxies comme les plus grandes structures connues, nous savons maintenant les rassembler en amas et en superamas de galaxies, qui sont eux-mêmes de petites parties des filaments de la toile galactique.
Un nouveau monde
« L’homme est un détail de l’Univers, un détail curieux à n’en pas douter, mais négligeable dans la grande harmonie de la matière. Qu’il se hâte et s’agite avec le légitime souci de se faire une place au Soleil, il ne recevra jamais de l’astre du jour que cette lumière et cette chaleur que lui assure la ronde aveugle du grain de sable dont il est le passager. » — Citation extraite du film
Avec soixante ans de recherches astronomiques viennent non seulement de nouvelles connaissances, mais également de nouvelles idées. L’astronomie nous remet en contexte dans l’Univers, et le constat est que nous sommes infiniment petits. Notre angoisse d’être insignifiants dans un Cosmos indifférent a eu un effet important sur notre société et sur sa relation avec l’espace et avec la Terre. Notre univers et d’autres œuvres artistiques furent parmi les premières à nous faire ressentir collectivement l’immensité du monde. Ce n’est que plus tard, toutefois, que de réelles images vinrent participer à cette tâche que semble s’être donnée l’astronomie : celle de nous remettre à notre place comme poussières de poussières d’étoiles.
« Regardez encore ce petit point. C’est ici. C’est notre foyer. C’est nous. Sur lui se trouvent tous ceux que vous aimez, tous ceux que vous connaissez, tous ceux dont vous avez entendu parler, tous les êtres humains qui aient jamais vécu. » — Carl Sagan
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Yann Audin est animateur scientifique au Planétarium Rio Tinto Alcan de Montréal. Il est détenteur d’une maîtrise et d’un baccalauréat en physique, d’une majeure en littérature et d’une mineure en mathématiques. Il a travaillé comme conseiller scientifique pour le Théâtre Bienvenue aux dames et comme aide-enseignant à l’Université Bishop’s. Yann est passionné par la science-fiction, l’astronomie et le cinéma. Il commencera une maîtrise en littérature comparée à l’Université de Montréal en septembre 2020.
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