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Luben et Elena : L’amour de l’art et l’art de l’amour

Luben et Elena : L’amour de l’art et l’art de l’amour

Luben et Elena : L’amour de l’art et l’art de l’amour

Il y a plus de vingt ans, au fil de mes pérégrinations en Amérique du Nord, j’ai par hasard visité une exposition à St. John’s. En pénétrant dans la Christina Parker Gallery, j’ai oublié le vent et le froid qui sévissaient dehors. Mon attention s’est portée sur une série d’œuvres intenses et éclatantes qui sont parvenues à faire vibrer mes racines bulgares au moment même où je découvrais cet univers inconnu qu’était pour moi Terre-Neuve. C’est à New York ou à Paris, que je me serais attendue à voir ces tableaux remplis de couleurs, d’émotion et d’énergie cinétique. Or, à ma grande surprise, ils se trouvaient ici, à l’extrême est du Canada !

Ellie Yonova est une réalisatrice et directrice photo canadienne. Née à Sofia, en Bulgarie, elle s’est installée au Canada en 1999. Ces 35 dernières années, sa carrière l’a menée sur quatre continents. Son film Luben et Elena est maintenant accessible sur ONF.ca.

L’artiste qui les avait réalisés, une jeune femme du nom d’Elena Popova, était arrivée à Terre-Neuve en 1990 avec le flot de Bulgares qui s’était déversé cette année-là sur la province. Dès l’ouverture de la frontière, quelque 3 000 ressortissants de ce pays, dont beaucoup d’artistes qui rêvaient de vivre libres et de s’exprimer sans contrainte, avaient pris la direction du Canada. Voilà comment j’ai fait la connaissance d’Elena et de son mari, le sculpteur Luben Boykov. Cette rencontre a d’ailleurs changé ma vie, puisqu’elle a lourdement pesé dans ma décision de m’établir à St. John’s.

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« La saisissante beauté de la nature, source d’inspiration constante pour Luben et Elena, apparaît dans les trois pays où se déroule l’histoire : Terre-Neuve au Canada, la Sicile en Italie et leur Bulgarie natale. »

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Au moment où j’ai fait le choix de réaliser ce documentaire, je les connaissais depuis vingt ans et j’avais été témoin de leur évolution, en tant qu’artistes et en tant qu’êtres humains. Il s’agissait évidemment d’une entreprise ambitieuse et téméraire, mais la perspective de tourner un film avec eux m’emballait. Je souhaitais profiter de cet accès intime et privilégié pour explorer une relation entre deux personnalités fortes et qui plus est, artistes. Je voulais suivre leur histoire d’amour, un cadre inusité et magnifique qui allait me permettre d’examiner des thèmes universels plus vastes, comme le rôle de l’artiste et la signification de l’art dans la société, la quête de libertés, la recherche d’une identité et d’une patrie.

La démarche artistique de Luben et d’Elena les a amenés à explorer divers concepts — la transformation, l’éphémère, la fragilité, le mouvement à travers l’espace et le temps, la vie et la mort — pour l’essentiel liés à tout ce qu’ils avaient eux-mêmes traversé. Le rôle de l’artiste, du point de vue de Luben, consiste à évoquer dans son œuvre les sentiments innés d’appartenance et de rapport à ce vécu universel. Créer une expérience cinématographique en strates qui touche le public d’une façon similaire a constitué mon principal défi.

En ce qui concerne la réalisation, j’ai adopté une approche fondée sur la découverte et sur le récit associatif, oscillant entre lieu et temps. Sur le plan esthétique, le film franchit cette ligne au moyen de l’image et du récit en brouillant les notions d’identité et d’origine, l’un des thèmes qu’abordent les œuvres de Luben et d’Elena. Cette façon non linéaire de raconter, alliée à un langage cinématographique percutant, a été le point de départ qui m’a permis d’une part, de créer un portrait juste de ces deux remarquables artistes et d’autre part, de mettre en évidence leur capacité de survivre comme couple en traversant des pays, des continents et des structures sociales.

Pour préserver leur authenticité et leur naturel — passionné, drôle et philosophe —, j’ai eu recours à une technique dont je me suis servie pendant des années dans les dramatiques et les longs métrages en Bulgarie, où les actrices et acteurs non professionnels servent souvent de moyens de création. Subtile et discrète, cette méthode consiste à solliciter la participation affective des protagonistes en leur expliquant l’objectif de la scène avant le tournage et en les amenant à s’exprimer librement et à improviser devant la caméra. Avec les années, comme Luben et Elena ont pris l’habitude quotidienne de s’assoir ensemble devant un café ou un verre de vin et de s’engager dans de longues conversations, nous avons choisi de situer le film dans le cadre de ces entretiens. Cette décision s’est révélée fondamentale pour mettre en lumière ces moments d’intimité qui leur sont familiers et en conserver le caractère naturel. De plus, le public allait lui aussi se sentir invité à participer à la discussion et à réfléchir à sa propre vie.

La saisissante beauté de la nature, source d’inspiration constante pour Luben et Elena, apparaît dans les trois pays où se déroule l’histoire : Terre-Neuve au Canada, la Sicile en Italie et leur Bulgarie natale. Elle s’inscrit en filigrane à l’intérieur du récit, s’incarnant dans les roches anciennes qui forment le littoral escarpé et l’Atlantique Nord glacial qui les fouette, dans l’abondance des couleurs et la variété des plantes et des fleurs qui prolifèrent sur les flancs de l’Etna, haut volcan et source de vie essentielle, ainsi que dans la splendeur sauvage du massif montagneux des Rhodopes, en Bulgarie. Trois lieux où Luben et Elena se sentent chez eux.

À l’histoire de leur art et de leur amour s’intègrent des photographies, des séquences vidéo, de nombreuses œuvres — tableaux, sculptures — et des gens. Tous ces éléments se fraient un chemin dans un espace-temps aux multiples strates. Ils ajoutent de la profondeur et de la vérité à l’engagement qu’a pris le couple : quitter la zone de confort qui freinerait l’âme artistique, une zone où résident également le patrimoine artistique, les amitiés et les souvenirs.

Je suis profondément reconnaissante à Luben et à Elena d’avoir manifesté autant d’ouverture, quel que soit le sujet, du plus léger au plus grave, n’hésitant pas à pousser l’autre à se livrer davantage au sujet de sa vie ou de son œuvre.

Ellie Yonova (ONF)

D’entrée de jeu, j’ai obtenu le soutien et la compréhension de ma productrice Annette Clarke, pilier du projet. Je remercie aussi le directeur photo de seconde génération, mon fils Svetoslav Mihaylov, avec qui la communication s’est établie en moins de deux pour engendrer de magnifiques images. Cette fée qu’est l’infatigable monteuse Hannele Halm a fait des merveilles avec sa baguette magique et Jeff Johnston a conclu sur une note brillante grâce à sa musique. Ce fut pour nous tous un plaisir de relever ces défis de création et de travailler ensemble dans l’amour, le respect et le dévouement.


Visionnez Luben et Elena :

Luben et Elena, Ellie Yonova, offert par l'Office national du film du Canada

 

 

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