6 films pour mieux comprendre la Journée internationale des migrants

Le 18 décembre 1990, l’Assemblée générale de l’ONU adopte la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Le but : démystifier les réalités des travailleurs migrants, que ce soit par rapport à leur adoption dans de nouvelles terres ou dans la compréhension plus exhaustive des situations des pays d’origine desquels ils proviennent.

Regards sur les migrants

Les cinéastes de l’ONF s’intéressent à la question migratoire depuis un certain temps. Dès 1962, Georges Dufaux et Jacques Godbout réalisent le court métrage documentaire Pour quelques arpents de neige, faisant référence à la citation du philosophe-superstar Voltaire concernant les mérites supposément dérisoires du nouveau continent.

Pour quelques arpents de neige, Georges Dufaux et Jacques Godbout, offert par l’Office national du film du Canada

Le film capte bien le discours officiel du Canada concernant la migration, soit une contribution bienvenue dans la grande mosaïque multiculturelle de cet énorme pays. Dans le train, des migrants venus de partout regardent la neige par la fenêtre, chantent les hymnes familiers des terres natales qu’ils ont quittées et discutent des nouvelles opportunités qui se présentent à eux. En 1962, une petite famille d’Alep cherchait déjà du réconfort au pays. Bref, l’ouverture du Canada face aux réfugiés Syriens ne date pas d’hier…

19 jours, Asha Siad et Roda Siad, offert par l’Office national du film du Canada

Un demi-siècle plus tard, 19 jours nous présente une réalité plus sobre. Les sœurs Asha et Roda Siad, filles de réfugiés Somaliens installés au Canada, filment le quotidien des demandeurs d’asile au Margaret Chisholm Resettlement Centre à Calgary. 19 jours, c’est le temps qu’il faut pour répondre à des questions parfois complexes sur nos origines, nos intentions, nos besoins et nos motifs; c’est le temps qu’il faut pour essayer de comprendre les infrastructures de la société d’accueil; et c’est le temps de faire des appels à la famille, désormais séparée, qu’on tentera d’aider en travaillant à l’étranger. Et elle est souvent épineuse, cette question du travail.

Trouver un emploi

Dans son long métrage documentaire De Sherbrooke à Brooks, Roger Parent dépeint le corridor migratoire qui existe au sein même du Canada, alors que les migrants s’étant installés à Sherbrooke, incapables de décrocher un emploi au Québec, quittent ce territoire pour se rendre à Brooks, en Alberta.

Une fois arrivé dans l’Ouest du pays, la partie n’est pas gagnée. Le documentaire 24 jours à Brooks dévoile le quotidien d’une lutte syndicale qui se déroule chez Lakeside Packers, l’un des plus gros abattoirs au monde (on y abat 40 % du bétail canadien), qui décide en 1995 d’engager activement des immigrants et des réfugiés dans son établissement. Sur les 13 000 habitants de Brooks, on compte 2 400 employés chez Lakeside, la moitié d’entre eux provenant de l’extérieur du Canada. Aujourd’hui, sur les quelques 5 000 emplois générés par des abattoirs au pays, 17 % d’entre eux sont occupés par des travailleurs issus de l’immigration.

24 jours à Brooks , Dana Inkster, offert par l’Office national du film du Canada

La priorité étant de subvenir aux besoins de leur famille, le tout dans un certain climat d’urgence, il arrive souvent aux nouveaux employés de voir leurs droits bafoués, parfois sans même savoir que ces droits existent. Sachant qu’il a souvent été démontré que le travail dans les abattoirs peut être particulièrement déshumanisant et dangereux, cette situation est des plus inquiétantes.

Dans son essai The ethics of what we eat, le brillant Peter Singer (Animal Liberation) explique comment son équipe de recherche, après avoir travaillé incognito dans un abattoir dans le cadre d’une enquête, témoigne des pires conditions de travail qu’elle n’a jamais connues. Avec Why we love dogs, eat pigs and wear cows, Melanie Joy révèle des statistiques troublantes quant aux cas de stress post-traumatique vécus par des employés d’abattoirs : une main d’œuvre non-éduquée, peu qualifiée et souvent exploitée impunément par des employeurs qui n’offrent que très peu de compensations en cas de blessures violentes ou mortelles. Ces statistiques trouvent écho dans 24 jours à Brooks, qui montre comment il est encore plus difficile de se battre pour ses droits lorsqu’on se retrouve dans une situation précaire.

Difficultés d’intégration au féminin

Enfin, dans le court métrage documentaire Femmes debout, la cinéaste Marie Ka témoigne du quotidien épuisant de trois  femmes francophones issues de l’immigration. Installées à Vancouver, ces immigrantes originaires du Sénégal, du Mexique et de la Belgique doivent jongler entre le travail, la famille et l’éducation de leurs enfants. Une lutte de tous les jours.

Femmes debout, Marie Ka, offert par l’Office national du film du Canada

Lorsqu’ils migrent au Canada ou ailleurs, les migrants quittent un pays qu’ils aiment, parfois à cause de la guerre, parfois à cause de politiques discriminatoires, et partent à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil et de travail, tombant parfois entre les mains de corporations indifférentes à leur sort ou à leur dignité. Il ne s’agit évidemment pas du seul parcours des migrants, mais il est important de se rappeler que cette réalité existe, question de développer un sens de la compassion pour les nouveaux arrivants. Alors que nous pouvons passer des années à vivre notre quotidien en toute tranquillité, leur période de transition peut s’avérer longue et douloureuse. Une situation qui ne doit jamais rester sous le silence.