Un vendredi soir au club vidéo
Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé aller au club vidéo. Lorsque j’étais enfant, mes parents, mon frère et moi allions régulièrement louer des films en famille le vendredi soir. C’était notre soirée pizza et cinéma. On parcourait les allées de notre club vidéo local à la recherche du film qui plairait à toute la famille. On avait souvent l’embarras du choix.
C’était l’époque des Indiana Jones, des Back to the Future, des Ghostbusters et des Crocodile Dundee. On rigolait avec les Teenage Mutant Ninja Turtles et des série comme Home Alone, et on rêvait en regardant Top Gun et Karate Kid. C’était les années 1980. Notre vie était au Québec, mais nos rêves étaient hollywoodiens… sauf peut-être pour la série des Contes pour tous.
Par la suite, je me suis mise à aller au club vidéo toute seule. C’était l’adolescence. Je n’avais pas envie de faire de compromis. C’est là que j’ai découvert les films de filles ou comme ils les appellent en anglais, les chick flicks : Pretty Woman, Légendes d’automne, Sixteen Candles, Ghost, Clueless, Jerry Maguire…
Au début des années 2000, j’ai fait mon entrée au cégep. C’est à cette époque que j’ai découvert les films d’auteur et les clubs vidéo de répertoire. Je me suis abonnée à la Boîte noire et je faisais régulièrement un arrêt chez le défunt Phos sur Côte-des-Neiges après mes cours à l’Université de Montréal. Ces clubs vidéo sont devenus de précieux complices à mon éducation cinématographique. Je louais une dizaine de films par semaine. Certains pour mes cours de cinéma, d’autres pour le plaisir.
Je passais des heures dans le sous-sol de chez mes parents à visionner vieux VHS sur vieux VHS. Je découvrais Kubrick, les frères Coen, Baz Luhrmann, Coppola – père et fille, Lars von Trier, David Lynch, Quentin Tarantino, Wong Kar-wai, Claude Jutra, Gilles Carle et tous les autres. C’était un moment de pur bonheur.
Lorsque j’entends aujourd’hui que des clubs vidéo ferment leurs portes, comme ce fût le cas récemment pour le géant Blockbuster et pour la succursale de La Boîte noire sur Laurier, c’est mon coeur qui pleure.
Un club vidéo, ce n’est pas seulement un endroit pour louer des films. C’est une odeur, un éclairage particulier, de longues rangées de films classés par genre ou par auteur, des milliers de jaquettes de films à découvrir, des échanges entre cinéphiles et de précieux conseils de la part des employés. C’est aussi l’embarras du choix et une sélection de films internationaux.
Dans le nouvel essai interactif de l’ONF, Un vendredi soir au club vidéo, produit en partenariat avec Le Devoir, on découvre l’histoire de 5 clubs vidéo de différentes régions du Québec :
- Vidéo Centre-Ville, à Québec, qui possède plus de 30 000 films.
- Royal Fashion, à Montréal, qui offre une sélection de films africains et nollywoodiens.
- Club vidéo Régo 3XXX, à Trois-Rivières, qui offre des films pour adultes.
- Vidéo du Carrefour, à Val-David, qui possède une collection de 16 424 films.
- Club vidéo dépanneur Premier choix, à Bécancour, qui tient un dépanneur et un club vidéo dans le même local.
Chacun d’entre eux tente de survivre au raz-de-marée qu’est l’Internet et la télévision sur demande. Certains ont trouvé le moyen de jumeler plusieurs entreprises dans le même commerce. D’autres se fient sur les liens tissés serrés qu’ils entretiennent avec leurs clients. Malgré tout, on ne peut s’empêcher de penser que leurs jours sont comptés.
Les clubs vidéo survivront-ils à la télévision connectée? Deviendront-ils chose du passé?
Parcourez l’essai interactif Un vendredi soir au club vidéo et si, comme moi, vous préférez encore le contact humain, continuez d’encourager votre club vidéo du coin.
+++
Produit par Dominique Willieme d’ONF/interactif, Un vendredi soir au club vidéo est une réalisation de l’artiste audiovisuel Cédric Chabuel, de la journaliste Alexandra Viau et de la boîte de design et de développement Web Deux Huit Huit. L’essai a été produit en partenariat avec le journal Le Devoir et fait partie d’un dossier spécial publié dans l’édition papier de samedi dernier et sur le site ledevoir.com/clubvideo.