Lettre à Vincent
Collaboration spéciale de Anne-Marie Lavigne.
Lettre à Vincent – D’un père à son fils suicidé…
Dans le cadre de la Semaine nationale de prévention du suicide, laquelle débute dimanche prochain, nous vous proposons une plongée interactive dans les émotions à vif d’un père en deuil.
À la mémoire de Vincent Godin, qui s’est enlevé la vie il y a un an – le 14 décembre 2009 – à l’âge de 16 ans, son père, l’illustrateur Éric Godin, et l’artiste Zïlon ont conçu le projet interactif Lettre à Vincent.
Touché par le décès du fils de son ami, Zïlon a encouragé Éric à écrire sur le drame qu’il vivait. Cet essai sonore et visuel, dont le père fait aussi la narration, est illustré par une cinquantaine d’encres et enrichi d’un environnement sonore original signé Zïlon.
Cette mise en mots et en images d’un authentique cri du cœur connecte sur l’indicible et l’inacceptable: le suicide d’un adolescent vu par un père « amputé à jamais de (son) Vincent ».
Pour visionner le projet : Interactif.onf.ca/lettreavincent
Pour en savoir plus sur la genèse du projet : Lettre à Vincent – Quelques réponses à vos questions
Site en l’honneur de Vincent Godin (et pour télécharger gratuitement le livre d’Éric Godin) : www.vincentgodin.com
Nous vous proposons aussi une visite de quelques œuvres qui s’inscrivent également dans l’exploration du thème de la santé mentale, un sujet prioritaire pour le Programme Français de l’ONF :
Otage de moi
Ça tournait dans ma tête
Les journaux de Lipsett
Chez soi
QUEL BEAU TÉMOIGNAGE LA LETTRE À VINCENT!
IL FAUT CONTINUER À EN PARLER LE SUICIDE EST UN FLÉAU .
C’EST FRANCHEMENT UN TEXTE EXTRÊMENT TOUCHANT.
CETTE SEMAINE J’AI RÉOUVERT LE COFFRE DE MES SOUVENIRS D’ENFANCE POUR TOUCHER DANS MES MAINS LA CEINTURE ,LA CALOTTE,ET LES OBJETS PERSONNELS QUI LUI APPARTENAIT.
J’AI RELU LE JOURNAL QUE J’AI ÉCRIS ET QUI RESSEMBLE ÉTRANGEMNT À LA LETTRE DE VINCENT.
GUY MON FRÈRE EST DÉCÉDÉ LE 21 SEPTEMBRE 2001,14 ANS À VIVRE SANS LUI, SA PRÉSENCE ME MANQUE TOUJOURS.
«LE SUICIDE EST UN CONFLIT ENTRE DEUX CRAINTES,IL Y’A SUICIDE LORSE QUE LA CRAINTE DE LA VIE L’EMPORTE SUR LA MORT»
CITATION DE VICTOR HUGO
Merci pour votre témoignage touchant, Claire.
je suis très touchée par votre texte ,je comprend votre souffrance ,ce doit être si difficile de continuer ,je sens en vous une très grande résilience et capacité de pardon sans borne DIEU merci je n’ai pas eu à vivre ce drame.Mon admiration et mon amitié vous accompagne et merci de ce partage.
Touchant témoignage!…Depuis 25 ans j’écris quotidiennement ou presque, à mon fils décédé à l’âge de 21 ans, je peux comprendre
la douleur de perdre son fils….depuis je suis un pantin qui avance parce qu’attaché aux cordes de la vie
je ne peux faire autrement. Courage à tous ceux qui vivent ce drame.
Je viens de lire Lettre à Vincent.J’aurais¨pu écrire une telle lettre.Mon fils Philippe s’est suicidé en 2005.Je le pleure encore,j’ai aussi marché sur une mine.Il avait 30 ans, il était beau, brillant, il aimait la musique, lire et
écrire.Je veux joindre ma voix à tous les parents qui sont des endeuillés du suicide.Je crois que nous devrions nous lever et crier notre indignation face à la société qui laisse ainsi mourir nos enfants.Bravo M.Godin, j’aimerais vous connaître.
Quel texte touchant! Étant grutier de profession au sommet de ma grue a ma pause, entre ciel et terre et lisant ce texte….je suis ébranlé, ayant moi même raté mon suicide en octobre 1998….j’aurais tant a dire et écrire….Quel tragédie!
Vincent
Depuis le debut de cette semaine j’ai un besoin essentiel de témoigner.Je suis une survivante depuis maintenant trente ans . J’avais 20 ou 21 ans quand j’ai voulu mettre fin à mes jours .
J’étais majeur ,je gagnais ma vie avait des amis ,un amoureux ,un artiste un peu bohëme .J’en suis une moi aussi à ma façon .Petite j’étais une rêveuse ,je m’inventai un monde et quand les lumières de la maison s ‘éteignaient ,les miennes s’allumaient ,alors, mon lit se transformait en planche de travail .Je disposais autour de moi : album ,crayons , gommes, stylos .J’écrivais des poëmes ,je dessinais ,je créai ..Pas étonnant que j’ai été séduite par ce garçon aux cheveux blonds ,aux yeux bleus , grattant sa guitare .
J’ai donc commencer à passer beaucoup de temps avec <> et ses deux amis ,.Ils m’ont appris une autre facette de la vie , sans drogue ni alcool toutefois .Nous ne faisions rien de mal .Mais nous étions un trio indissociable, libre.
Mes parents ont à ce moment là senti que je leur échappais . Je ne rentrai plus les fins de semaine et malgré mes 20 ans ,je devais inventer des mensonges pour ne pas attiser leur colère .J’étais la seule fille de la famille ,l’enfant du milieu ..Maman n’a pas su me préparer à grandir à devenir une femme ,elle était comblée et à la fois dépassée peut-être par notre petit frère .Je ne lui en veux plus . Elle avait aussi ses propres souffrances .Je coupais peu à peu les ponts avec ma famille ,pourtant très unie .
Je suis très vite tombée amoureuse de ce guitariste avec qui nous passions des heures à chanter à philosopher .Nous rêvions de refaire le monde .
Je dormais peu ,je travaillais . C’était pour moi un monde nouveau .Je me sentais libre , je me sentais écoutée ,comprise , je n’avais jamais reçu autant d’attention depuis longtemps ,je me sentais aimée et respectée .
Les parents ont vite compris que je leur échappais. Pas question à cette époque de relation avant le mariage .La sexualité était bien évidemment un sujet tabou chez nous .Pas question de prendre la pillule et heureusement que sur ce plan là je ne leur ai pas demandé leur avis .J’étais majeur .
Puis quelques jours après le mariage de mon frère aîné ,tout a basculé . Je me suis écroulée devant la porte de la chambre de mes parents .
Je ne me rappelle plus l’ordre chronologique des choses …
La fatigue , les nuits blanches , le travail, l’émotion de savoir que mon frère, mon ami quittait la maison un sentiment de perte d’abandon ???
Le médecin me prescrit du Valium . Je deviens plus docile , plus calme …là encore j’ai un trou de mémoire .. Après quelques jours de repos je reprends le travail et revois mes amis . Pour me permettre de me distraire l’un d’entre eux me propose la vieille télé de ses parents car la encore il y avait eu restriction du côté de mes parents .. Pas de télé car je risquais ne de pas aller travailler le lendemain .Encore là Ils doutaient de moi ..Ce dimanche là je ne suis pas rentreé à la maison leur expliquant la situation… En plein milieu de l’après- midi ils ont fait éruption dans mon petit studio et m’ont vu entouré de mes trois amis gars…Çà a été un choc pour eux sans doute .Pourtant il n’y avait rien d’anormal dans cette situation ,Juste deux copains qui voulaient mon bien-être …..
Papa a mis tout le monde dehors et devant ma mère et ma tante m’a fichu un giffle qui fut fatale …
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Je me suis exécutée . Sans voix comme un zombie ,je suis montée dans ma voiture ,Je ne sais par quel miracle je suis arrivée à la maison…Je n’étais plus de ce monde .
A peine avais-je mis le pieds dans la veranda que le téléphone a sonné Toujours comme un automate J’ai décroché.C’était mon oncle préféré ..
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Puis Je suis montée dans ma chambre de jeune fille est fermée la porte, me suis allongée sur mon lit et j’ai avalé le tube de Valium prescrit par le brillant médecin de l’époque.
J’ai été hospitalisé dans un hopital psychiatrique ,puis transférée dans un centre hospitalié celui ou je sui née .
Quand j’ai ouvert les yeux , la première personne que j’ai aperçu dans le couloir de de l’hopital psychiatrique c’est l’ombre de mon amoureux …J’ai su par le suite qu’il venait voir sa maman qui elle aussi avait fait un tentative de suicide !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Puis j’ai vu maman assise prêt de mon lit , le visage décomposé ,déroutée , accablée anéantie…
Durant mon séjour à l’hopital je ne voulais plus voir mon père .La famille venait me voir surtout maman …Mon frère m’a été d’un grand secour aussi .
J’ai beaucoup dessiné .Je ne me souviens pas avoir eu l’aide d’un psychologue .Un psychiatre oui durant cette semaine …mais après plus rien . J’ai vécu longtemps avec cette culpabilité là d’avoir fait de la peine à mes parents .’est moi qui est voulu mourrir parceque je pensais que plus personne ne m’aimait .Mon monde venait de s«,écrouler .
Ils m’ont ensuite envoyé chez des amis à eux en montagne durant presque quinzes jours .Et là entourée de beaucoup d’attention ,de compréhension j’ai recommencé à avoir fois en la vie . J’étais une personne dynamique ,pétillante , drôle ,joyeuse …
Je suis consciente de cette fragilité ,et quand la vie frappe fort ,quand je dois faire face à toute sorte de défit je repends des moyens pour m’en sortir .
Je n’avais jamais parlé de celà avec mes enfants ,mais quand j’ai failli perdre un de mes garçons dans un accident de voiture ,parcequ’il aimait trop la vitesse ,parceque sa colère trop inibé le poussait à conduire d’une façon exessive . Je lui ai dit que sa façon de conduire était suicidaire et je lui ai avoué alors que moi aussi un jour de ma 20 eme année
J’ai voulu mettre fin à mes jours .
Il n’y a rien de pire que le silence ,les non-dits . Jamais dans ma famille nous n’avons prononcé une seule fois le mot suicide ,nous n’en avons jamais reparlé.
Lors d’un repas l’autre soir j’ ai décidé d’en parler avec mon plus jeune fils .C’est difficile d’en parler ouvertement .çà reste un sujet tabou.Comment expliquer à ces enfants qu’à vingt ans leur maman à voulu s’enlever la vie .. Mauvais diagnostique ,mauvaise médication ??? et que celà a des conséquences durant toute notre vie ….J’ai été chercher de l’aide il y a quelques années je travaille encore sur moi ajourd’hui …
Je fais moi aussi de cette semaine suicide action mon cheval de batail ,c’est une cause qui me tiend à coeur Merci d’avoir pris le temps de lire ce courriel …Si ce témoignage peut aider j’aurai fait un autre pas vers le présent et le futur….
Évelyne
Salut Éric, ancien chum d’école. On a le même âge, nos fils on le même âge, le mien a son mal de vivre d’ado lui aussi ce qui a toujours été pour moi une source certaine de cette anxiété qui ronge les parents d’adolescent qui en bavent dans la jungle humaine. J’ai moi aussi appris le décès de Vincent par le reportage de l’émission Desautels à Radio-Canada vendredi soir, je ne savais même pas que tu était père toi aussi. Je suis bouleversé par ce que tu vis et redoute encore plus aujourd’hui de vivre un jour cette drastique et injuste coupure. Paradoxalement, t’entendre parler de ta douleur à la radio, m’apporte beaucoup d’espoir et de volonté de fouiller encore plus loin les mystères douloureux de mon fils. Éric, mes pensées sont avec toi depuis deux jours et j’attends impatiemment de lire cette lettre demain, je m’y prépare, j’y trouverai sûrement encore plus de conviction à ne plus jamais prendre aucune réaction, parole, geste de mon fils à la légère. Je sais que tu en amèneras plusieurs à voir le suicide autrement. Merci et au plaisir de te revoir. Richard Gravel, Montréal. 1980-81 arts plastiques, Cégep Lionel-Groulx.
Message à l’attention de Danielle ainsi que sa famille, j’ai appris hier via le reportage à Radio-Canada la triste nouvelle. Cela fait un petit bout de temps que tu as quitté Sherbrooke et je ne peux m’empêcher d’imaginer à quelle point cela a dû t’affecter. Sans doute êtes vous encore sous l’ombrage de ce noir nuage, mais j’espère qu’avec la lumière de Vincent vous trouverez de nouveau votre souffle de vie aussi difficile puisse-t-elle parfois. J’encourage et félicite M.Godin pour ce beau projet à la fois artistique et courageux. Je suis émue par ce drame qui malheureusement arrive trop souvent. J’y aie survécu et aujourd’hui je remercie la vie pour ses beaux cadeaux dont mon fils Éloïc pour qui je ferais n’importe quoi. Je n’ose même pas imaginer vivre ma vie sans lui. Vous êtes un exemple à honorer puisque vous aussi non seulement vous survivez mais vous avez trouvé la force de vivre et de recommencer à sourire. Félicitation! Et merci. Magali Bourget, sherbrooke, 29 ans.
Pour partager une part de souffrance de survivante aux deuils de mon père et de ma jeune soeur.