Explorez la Première Guerre mondiale avec Le journal de Rose (9/10)
1er janvier 1917
Cher journal,
Alors qu’une autre année s’amorce, ma vie m’entraîne une fois de plus dans une direction que je n’aurais jamais imaginée. Non seulement Elisabeth von Werdenberg m’a obtenu un passeport, mais elle a décidé, de manière inattendue, de me chaperonner en Allemagne. À l’évidence, je n’aurais jamais réussi sans son aide.
À la frontière austro-allemande, les agents de l’immigration qui sont montés à bord du train ont conversé brièvement et poliment avec Elisabeth avant de nous remettre nos passeports. Mon allemand étant loin d’être parfait, j’aurais vraisemblablement été exposée n’eût été sa présence. Nous sommes promptement arrivées à Berlin, et je dois dire que, même en temps de guerre, cette ville est l’une des plus belles et des plus fascinantes qu’il m’ait été donné de voir.
Ici, l’art et la culture me rappellent que, pendant que les politiciens gouvernent, les citoyens créent.
Pendant notre séjour à Berlin, nous avons pu suivre la progression de la guerre, et plus particulièrement la fin de ce que les Russes appellent l’offensive Broussilov, sur le front de l’Est.
La plupart des Allemands en parlent comme d’un échec… Selon certains, l’offensive s’est soldée par une cuisante défaite pour les Russes, qui y ont perdu plus d’un million d’hommes. D’autres pensent tout bas que cette opération est une diversion dont les Empires centraux n’avaient surtout pas besoin. En effet, elle a nécessité un redéploiement massif des troupes du front de l’Ouest et a officiellement contraint la Roumanie à entrer dans le conflit, ce qui a augmenté le nombre des effectifs militaires à redéployer. En tant que Canadienne, j’oublie parfois que les batailles engagées en France et en Belgique ne sont pas les seuls théâtres de guerre. Sans nos alliés dans l’Est, les Allemands auraient pu s’investir dans leur poussée vers Paris, et les trois dernières années auraient été fort différentes.
Depuis environ une semaine, de terribles cauchemars hantent mes nuits. Je rêve que je suis un soldat tapi au fond d’une tranchée qui, à chaque instant, doit prendre des décisions mettant des vies en péril. Peut-être est-ce pour cette raison que la soirée d’hier me semble être une curieuse coïncidence. Pour nos déplacements en ville, je joue le rôle de la servante silencieuse d’Elisabeth. Hier soir, alors que nous étions au Neopathetisches Cabaret, dans le quartier de Mitte, qui avons-nous rencontré ? Son grand ami Sigmund Freud.
Même si je n’ai pas pu suivre leur conversation, il m’est apparu clairement que Freud est un homme spécial. Il a capté l’attention de tous ceux et celles qui l’entouraient, dont un directeur de théâtre nommé Ernst Röckel. Ami proche de Siegfried Wagner, Ernst a conté des anecdotes à propos du frère de ce dernier, Richard, qui est probablement le plus grand compositeur allemand.
Avant de devenir soldat, Ernst était décorateur de théâtre. Il a apporté une contribution significative à la guerre en développant des techniques de camouflage et en créant notamment des silhouettes découpées dans du carton qui servent de leurres.
Blessé au combat il y a environ deux ans, il boite toujours. Cela me fait réaliser une fois de plus que, dans toute guerre, les deux camps subissent des blessures profondes et des torts parfois irréparables. Verrons-nous un jour la fin de ce terrible conflit mondial ?
À la prochaine, cher journal.
Rose
Les six grands concepts de la pensée historique
Concept 6 : La dimension éthique
Comment l’histoire peut-elle nous aider à vivre dans le présent ?
Bien qu’elle ait passé les derniers mois en « territoire ennemi », Rose continue pourtant de rencontrer des amis et des confidents. Elle commence aussi à reconnaître que la guerre est brutale, peu importe le camp dans lequel on se trouve. Il était plus facile de considérer l’ennemi comme un démon cruel lorsqu’elle écrivait au Canada, mais maintenant, la vérité est plus nuancée. Ses récentes rencontres ne lui permettent pas de distinguer clairement le bien et le mal. En tant qu’historiens, nous sommes susceptibles d’aborder notre analyse des événements selon notre point de vue personnel. Ce faisant, nous posons des jugements éthiques inconscients en effectuant nos recherches. En situant les événements dans un contexte historique plus vaste, il est possible de peser le pour et le contre tout en prenant des décisions éclairées. De cette manière, nous présentons l’histoire telle qu’elle s’est déroulée et non telle qu’on veut l’imaginer.
- Indicateur 1 : On pose des jugements éthiques implicites ou explicites lorsqu’on rédige des récits historiques.
- Indicateur 2 : Il faut tenir compte du contexte historique pour poser des jugements éthiques rationnels sur des actions passées.
- Indicateur 3 : L’application de normes contemporaines peut influencer notre interprétation du passé.
- Indicateur 4 : Notre devoir de mémoire et notre réaction aux contributions et aux sacrifices du passé découle d’une évaluation juste des répercussions éthiques de l’histoire.
- Indicateur 5 : L’histoire peut nous aider à prendre des décisions éclairées sur des questions contemporaines seulement si nous savons reconnaître les limites des leçons du passé.
Tous les indicateurs de la pensée historique
Ce billet a été rédigé par David Finkelstein.
« J’adore les surprises que renferme la nouvelle mouture des films de CAMPUS. L’ONF propose une diversité de points de vue presque sans précédent. En classe, je souhaite que mes élèves développent leur pensée critique et leur empathie, deux compétences essentielles. Enseignant agréé de l’Ontario, j’ai élaboré des programmes portant sur plusieurs films de CAMPUS, dont le guide pédagogique sur Nul poisson où aller abordant la question des réfugiés. »
Le journal de Rose est conçu en partenariat avec Apocalypse, la Première Guerre mondiale.