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Samedi, la nuit : « Ma vraie patrie, ce sont les gens »

Samedi, la nuit : « Ma vraie patrie, ce sont les gens »

Samedi, la nuit : « Ma vraie patrie, ce sont les gens »

Porté par une vision douce-amère du vieillissement et de la solitude en milieu urbain, Samedi, la nuit est un court essai documentaire narré en espagnol par la cinéaste Rosana Matecki.

Cinéaste canadienne d’origine vénézuélo-polonaise, Rosana Matecki (RM) a consacré une carrière de plusieurs décennies à la création d’un cinéma indépendant. À la fois réalisatrice, scénariste et productrice, elle a privilégié le documentaire et tourné des films au Canada, en Bolivie, au Venezuela, en Colombie et à Cuba. Le court métrage documentaire Samedi, la nuit (2021), dont elle a signé le scénario et la réalisation, marque sa première collaboration avec l’ONF. Le film est maintenant accessible sur onf.ca.


Vous avez toujours nettement privilégié l’approche du cinéma d’auteur dans votre travail. Pourquoi avez-vous choisi de faire du cinéma documentaire axé sur le récit intime ?

Rosana Matecki (Photo : Fernando Bracho-Bracho)

RM : Être un auteur signifie avoir une vision et faire route avec elle. Le documentaire est une forme vivante, et je crois qu’il est plus ambitieux que la fiction. Il nous permet de nous rapprocher de la vie d’autres personnes. En ce qui me concerne, ces vies sont généralement très différentes de la mienne. Il importe donc que quiconque choisit de prendre part à l’expérience assimile le fait de devenir l’acteur ou l’actrice de sa propre réalité. Je trouve fascinant de tomber sur des gens qui sont de vastes sources d’énergie. Chaque personne a ses propres références. Comme en amour, il s’agit de séduire les gens afin qu’ils comprennent ce que vous recherchez chez eux. Nous nous accompagnons mutuellement sur le parcours et nous apprenons tous et toutes beaucoup en route, surtout durant le tournage. Le tournage m’encourage et me motive toujours à continuer de créer et d’évoluer en tant que cinéaste. C’est le moment où je sais que je fais ce que je suis censée faire.

Je ne conçois pas le cinéma d’un point de vue rationnel, mais comme le désir de créer un espace dans lequel les rêves inspirent le quotidien. C’est au cours d’une période difficile de ma vie que j’ai appris que je voulais devenir cinéaste. Quand je suis sortie de cette transition, je me suis mise à faire les films que je voulais faire. Je suis aussi véritablement obsédée par le souvenir. Ça me déchire. Si ce que nous étions n’existe plus, alors que sommes-nous ? Quelle est la part de nous qui survit et quelle est celle qui ne survit pas, et comment racontons-nous ces histoires ?

« Je ne conçois pas le cinéma d’un point de vue rationnel, mais comme le désir de créer un espace dans lequel les rêves inspirent le quotidien. C’est au cours d’une période difficile de ma vie que j’ai appris que je voulais devenir cinéaste. » – Rosana Matecki (Photo : Fernando Bracho-Bracho)

Les diasporas connaissent des processus complexes de transplantation, d’appartenance, d’intégration et de retour. Après plus de vingt ans au Canada, estimez-vous que votre identité et votre pratique cinématographique demeurent partagées entre l’ici et l’ailleurs ?

RM : Je pense que nous émigrons toute notre vie. Pour moi, la diaspora, ce n’est pas le fait d’être d’un lieu ou d’un autre. Je ne l’ai bien sûr compris qu’avec le temps et l’expérience. Je décris cela comme une hallucination ou un rêve. Il ne s’agit pas d’une patrie, mais simplement d’un autre monde. J’ai beau être un mélange de Latino-Américaine, de Nord-Américaine et d’Européenne, ma vraie patrie, ce sont les gens.

Dans vos films, vous donnez du pouvoir à des protagonistes historiquement marginalisés. Pourquoi est-ce important pour vous ?

RM : J’admire beaucoup les cultivateurs, les paysans et les communautés autochtones. Je me passionne pour les gens qui travaillent dur, physiquement. L’effort et le travail nous élèvent tous et toutes. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi Magaly pour mon film Samedi, la nuit. Elle est coiffeuse et travaille dans une épicerie. Elle exécute aussi des travaux de nettoyage au Canada et exploite une ferme en Colombie. Rien ne la gratifie autant que le travail. J’ai fait sa connaissance le jour de la mort de Leonard Cohen. Nous avons parlé un moment, puis elle m’a dit : « Toi, tu me vois, Rosana. Personne ne me voit, ici. » C’est un sentiment que nous partagions, et nous nous sommes tout de suite comprises.

Qu’espérez-vous que le public retienne de Samedi, la nuit ?

RM : La solitude est un sentiment auquel les êtres humains ne cessent de se heurter. Un genre de mur des Lamentations dont nous ne semblons pas savoir quoi faire. Cela m’a amenée à réfléchir au fait qu’après toutes ces années vécues au Canada, je me devais d’examiner à ma façon cette notion de solitude. Longtemps, j’ai résisté à l’appartenance. Mais dans ce cas, qu’est-ce que je fais ici ? Le temps était venu pour moi de m’interroger sur la personne que je suis dans ce lieu. L’Office national du film du Canada a compris cette démarche et a fait confiance à ma vision de réalisatrice. Je souhaitais trouver un peu de l’Amérique latine à Montréal. J’ai finalement fait mon deuil au cours de ce processus, ce qui m’a procuré un énorme sentiment de liberté. J’espère que le public aura cette impression en voyant Samedi, la nuit.


Visionnez Samedi, la nuit :

Samedi, la nuit, Rosana Matecki, offert par l’Office national du film du Canada

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