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Je pleure dans ma tête | Les mots de la cinéaste

Je pleure dans ma tête | Les mots de la cinéaste

Je pleure dans ma tête | Les mots de la cinéaste

Réaliser Je pleure dans ma tête fut pour moi une immersion dans la violence de la guerre et des traumatismes qu’elle fait subir aux populations touchées. Cette incursion, j’ai voulu la faire à travers l’intégration scolaire des jeunes réfugiés qui débarquent au Québec.

Ex-journaliste, Hélène Magny se consacre au documentaire depuis plus de 20 ans. Le point commun entre tous ces films : un regard engagé. Je pleure dans ma tête – Les traumas par les mots, maintenant accessible sur onf.ca, est son neuvième film.

Ce que j’ai découvert est inédit : un milieu scolaire qui commence à s’ouvrir au parcours migratoire difficile des jeunes qui ont vécu des traumatismes et la reconnaissance que l’école peut servir à leur reconstruction.

La réalisatrice Hélène Magny.

Le sort des réfugiés m’intéresse depuis longtemps. En 2010, j’ai fait un film sur la résistance à la dictature birmane où j’ai pénétré dans des camps de réfugiés vieux de 50 ans. J’ai été profondément marquée par ce tournage. J’ai aussi fait des films avec des réfugiés au Congo, au Liban, et j’ai toujours eu le même sentiment : ce sont des gens abandonnés à eux-mêmes, sans ressources et sans espoir.

Quand on parle des réfugiés, on s’intéresse à leur présent, à leurs conditions de vie. On s’intéresse aussi à leur avenir : vont-ils sortir des camps, trouveront-ils un pays d’accueil ? Mais on se préoccupe rarement de leur passé, de leur parcours, du vécu qu’ils ont dû fuir. J’ai voulu découvrir les conséquences psychosociales de la guerre sur eux en abordant la violence, les pertes, les deuils…

Quand j’ai entrepris ma recherche, j’ai constaté que, dans les écoles, on comprenait mal les comportements des jeunes réfugiés liés aux séquelles de leur passé. Le sujet étant méconnu et peu documenté, j’ai donc fait de l’intégration scolaire le thème principal de mon film.

Mon personnage principal, Garine Papazian-Zohrabian, est une psychologue libanaise d’origine arménienne qui a elle-même vécu 15 ans de guerre au Liban. Elle m’a fait prendre conscience de l’ampleur et de l’importance du sujet. Professeure titulaire à l’Université de Montréal, elle sensibilise le personnel enseignant aux traumatismes des jeunes, qu’ils aient vécu la guerre ou la maltraitance. Garine propose d’encourager ces enfants à s’exprimer dans des groupes de parole avec d’autres jeunes afin d’inciter chaque élève à verbaliser son désarroi, ses peurs. « La mission de l’école au Québec est d’instruire, qualifier et socialiser. Mais, malheureusement, on ne s’occupe pas assez de la socialisation de l’enfant », soutient Garine dans ses formations au corps enseignant de nos écoles.

Garine Papazian-Zohrabian propose d’encourager ces enfants à s’exprimer dans des groupes de parole avec d’autres jeunes afin d’inciter chaque élève à verbaliser son désarroi, ses peurs.

Pour le film, j’ai décidé de suivre pendant un an l’intégration d’une de ces personnes réfugiées. Quand j’ai rencontré Mandjey dans une école secondaire de Laval, j’ai eu un véritable coup de foudre. Née dans un camp de réfugiés en Côte d’Ivoire, elle ne savait ni lire ni écrire en arrivant au Québec à l’âge de 15 ans. Ayant subi une grande violence dans les camps, Mandjey incarne pour moi un courage rare qui m’a beaucoup inspirée pour le film.

J’ai aussi eu un coup de cœur pour l’enseignant Arezki lorsque je faisais le tour des écoles de quartier qui reçoivent de fortes concentrations de classes d’accueil. M. Arezki, immigrant lui-même, s’identifie à ses élèves. Il les comprend et les fait parler de leur parcours. Ma rencontre avec lui fut déterminante.

Moi, ce qui m’intéresse dans mon métier, ce sont les gens et l’art de mettre en lumière leur humanité, mais aussi ce à quoi ils font face. Tous mes sujets ont pour but de susciter un débat social autour d’une problématique.

J’ai construit le documentaire pour qu’il puisse s’adresser à tout le monde. Car la fragilité de la santé mentale est un sujet universel. « Il y a des contextes qui peuvent ébranler notre santé mentale, dit Garine. La vie n’est pas banale […]. » Il faut reconnaître que l’être humain peut être fragilisé par des événements ; cela ne veut pas dire qu’il souffre d’un problème de santé mentale et qu’il faut le médicamenter. Ce constat vaut pour bon nombre de réfugiés que nous recevons, mais aussi pour des enfants qui vivent de la maltraitance.

Moi, ce qui m’intéresse dans mon métier, ce sont les gens et l’art de mettre en lumière leur humanité, mais aussi ce à quoi ils font face. Tous mes sujets ont pour but de susciter un débat social autour d’une problématique. J’ai une formation de journaliste, il est important pour moi qu’un sujet apporte une réflexion sur des questions auxquelles nous sommes confrontés dans le monde actuel.

Ce film restera gravé dans mon cœur pour toujours, car il fut entouré d’une grande intimité créée par un degré de confiance établi dans le temps. Il faut prendre son temps quand on fait un documentaire ; la confiance est fondamentale. La profondeur des relations développées avec ceux qui me permettent d’entrer dans leur vie et leur intimité pour en tirer un film est le plus beau cadeau que je reçois dans mon travail de documentariste. C’est pourquoi ce métier m’inspire toujours autant.


Visionnez Je pleure dans ma tête (Les traumas par les mots).

Je pleure dans ma tête (Les traumas par les mots), Hélène Magny, offert par l’Office national du film du Canada

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