L’ONF, un tremplin dans la carrière des cinéastes francophones hors Québec | Perspective du conservateur
En mars, l’ONF participe, pour une 16e année consécutive, aux Rendez-vous de la Francophonie en offrant des programmes gratuits en salle et en ligne, qui, cette année, mettent en valeur l’Acadie et son peuple. Vous trouverez la programmation complète en cliquant ici. La participation de l’ONF à cet événement a toujours été une occasion de faire découvrir les œuvres des cinéastes francophones en situation minoritaire.
Plusieurs de ces créatrices et créateurs francophones venant de l’extérieur du Québec ont eu la chance de commencer leur carrière par le biais de concours ou de programmes offrant la possibilité de réaliser un premier film dans un contexte professionnel. Revenons quelque peu sur la petite histoire de ces concours et programmes et sur quelques cinéastes qui s’y sont démarqués.
Le documentaire renouvelé
À la fin des années 1990, les programmes anglais et français de l’ONF sentent le besoin de faire de la place à de nouvelles visions et de nouvelles approches. Cet objectif passe par une collaboration accrue avec des cinéastes de toutes les régions du pays et surtout avec de nouveaux créateurs et créatrices. En 1999, le Studio Acadie (aujourd’hui le pôle de Moncton du Studio de la francophonie canadienne) lance le concours Jeunes documentaristes en Acadie, qui deviendra, l’année suivante, Nouveaux cinéastes en Acadie.
C’est dans le cadre de ce concours que Paul Émile d’Entremont réalise son premier film, Seuls, ensemble (2000). Depuis, l’œuvre documentaire du réalisateur acadien s’impose avec des films comme Reema, allers-retours (2006), Une dernière chance (2012) et Franchir la ligne (2018).
Une dernière chance, Paul Émile d’Entremont, offert par l’Office national du film du Canada
Le Studio Ontario et Ouest (aujourd’hui le pôle de Toronto du Studio de la francophonie canadienne) n’est pas en reste. En 2004, il crée le programme Momentum, qui donne la possibilité à de jeunes cinéastes de tourner un premier court métrage documentaire.
Claude Guilmain y réalise son premier film, Portrait d’un parfait inconnu (2006). Depuis, la filmographie de ce cinéaste franco-ontarien, qui s’est beaucoup intéressé à l’histoire et aux interventions des forces armées canadiennes, ne cesse de s’enrichir avec des documentaires tels que Entre les lignes (2008), Le 22e Régiment en Afghanistan (2011), Je me souviens, 100 ans du Royal 22e Régiment (2014) et Sur la corde raide (2019). Il a également réalisé deux films sur des lauréates du Prix du Gouverneur général : La sentinelle (2010), qui rend hommage à la comédienne Françoise Faucher, et L’urgence de dire (2017), qui honore la metteuse en scène et directrice artistique Brigitte Haentjens.
Portrait d’un parfait inconnu, Claude Guilmain, offert par l’Office national du film du Canada
PICLO
En 2001, le ministère du Patrimoine canadien met sur pied le Partenariat interministériel avec les communautés de langue officielle (PICLO). Ce programme a pour objectif de promouvoir le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. L’ONF s’avère un partenaire idéal. Deux initiatives sont rendues possibles grâce à ce partenariat : le concours AnimAcadie (2004), qui a pour but de recruter de nouveaux talents acadiens en animation, et la série de courts documentaires 5 par 5 (2007) du Studio Ontario et Ouest, sur des artistes francophones en Ontario. Mais c’est la création du concours Tremplin en 2005 en Acadie, et l’année suivante au Studio Ontario et Ouest, qui sera le moment fort de cette collaboration entre l’ONF et Patrimoine canadien. Ce concours donnera l’occasion à de nouveaux cinéastes francophones en situation minoritaire de réaliser une première œuvre documentaire dans un contexte professionnel.
Le concours Tremplin
Les résultats sont spectaculaires! Depuis une quinzaine d’années, Tremplin nous fait découvrir des courts métrages documentaires de grande qualité et des cinéastes prometteurs. Un dimanche à 105 ans (2007) est un excellent exemple. Offert gratuitement sur ONF.ca dès sa sortie, ce film du documentariste acadien Daniel Léger reste à ce jour un des titres les plus vus sur le site.
Daniel Léger a réalisé depuis deux longs métrages : Les inséparables (2011) et Les artisans de l’atelier (2018). Il faut aussi mentionner 360 degrés (2008) de Caroline Monnet. La réalisatrice et artiste visuelle d’origine française et algonquine nous a donné depuis Mobiliser (2015). Elle travaille présentement à la postproduction, dans le secteur privé, de son premier long métrage documentaire. Une autre cinéaste de talent, Marie-France Guerrette, s’est fait valoir dans le cadre de ce concours avec Le chœur d’une culture (2009) et Mon père, le roi (2010). La réalisatrice franco-albertaine nous offrait, en 2019, son premier long métrage, Sans maman.
Un dimanche à 105 ans, Daniel Léger, offert par l’Office national du film du Canada
Le choeur d’une culture, Marie-France Guerrette, offert par l’Office national du film du Canada
Une tradition bien implantée
Le concours Tremplin, qui, à partir de 2009, ne bénéficie plus de l’appui financier du PICLO, reste tout de même en place au Studio de la francophonie canadienne. Au cours de la dernière décennie, les pôles de Moncton et de Toronto ont produit pas moins de 16 documentaires via ce concours.
Mentionnons Ma radio, mon amie (2013) de Karine Godin, qui trace un portrait attachant de quelques auditeurs d’une radio communautaire francophone d’Acadie, Femmes debout (2015) de Marie Ka, qui s’intéresse à des femmes immigrantes francophones à Vancouver, Partie de moi (2016) d’André Roy, qui aborde l’alopécie (perte de cheveux) chez les femmes, Le bonheur de Lucien (2019) de Nathalie Hébert, sur Lucien Comeau, musicien et philosophe du quotidien qui a le bonheur facile, et Contes d’une grossophobie ordinaire (2019) de Josiane Blanc, un documentaire percutant sur la discrimination et l’intimidation basées sur le poids.
Ma radio, mon amie, Karine Godin, offert par l’Office national du film du Canada
Les studios Acadie et Ontario et Ouest, aujourd’hui regroupés sous l’appellation « Studio de la francophonie canadienne », ont toujours pu compter sur des cinéastes bien établis depuis leur création à la fin des années 1970. Pensons notamment à Léonard Forest, Monique LeBlanc, Herménégilde Chiasson, Renée Blanchar ou Rodolphe Caron en Acadie, ainsi qu’à Jacques Ménard, Claudette Jaiko, Claude Grenier, Sylvie Van Brabant ou Lisa Fitzgibbons pour l’Ontario et l’Ouest.
Il est donc remarquable de constater que, depuis la fin des années 1990, les deux pôles de production n’ont jamais cessé de consacrer des efforts au recrutement et à la formation de nouveaux talents.
Je vous invite à visiter notre chaîne consacrée aux films issus du concours Tremplin, ici.