Maladie mentale et crimes violents | Louez 3 films percutants de John Kastner
Il y a de ces films desquels vous ne sortez pas indemne après les avoir vus! Des films qui vous bouleversent, vous troublent, vous choquent, remettent en cause vos convictions les plus certaines ou vous poussent à vous demander ce que vous auriez fait dans la même situation. Les films du cinéaste canadien John Kastner, lauréat de quatre prix Emmy, sont de ceux-là.
Le lancement cette semaine sur ONF.ca de Loin d’eux-mêmes, loin des autres (2014), le dernier opus de Kastner, m’amène à parler de ses trois films réalisés en coproduction avec l’ONF. Trois films qui forment ce que l’on pourrait appeler la trilogie de la réconciliation. Réconciliation d’un père et d’une mère avec leur volonté de supporter leurs fils accusé de meurtre et le fait de savoir que ce même fils a tué leur propre fille (Meurtre au sein de la famille, 2010). Réconciliation d’un homme schizophrène, déclaré non criminellement responsable d’une attaque au couteau, avec sa maladie, puis avec sa victime et les parents de celle-ci (NCR : non criminellement responsable, 2013). Réconciliation de patients d’une aile psychiatrique ayant commis des crimes violents, qui tentent de reprendre leur vie en main afin de réintégrer leur communauté, avec une société qui a tendance à les diaboliser et à les ostraciser (Loin d’eux-mêmes, loin des autres, 2014).
Meurtre au sein de la famille
La famille Jenkins mène une vie sans histoire dans une petite ville de l’Ontario, Chatham. Un soir de janvier, Jennifer, la cadette de la famille, est retrouvée morte dans le sous-sol de la maison familiale, tuée de cinq balles de fusil. Très vite, les soupçons se portent sur son frère Mason. Il est arrêté, accusé formellement du meurtre de sa sœur, puis condamné. Mais Mason clame son innocence. Qui a tué Jennifer? Pourquoi? Les parents sont vite confrontés à leur désir de soutenir leur fils et l’horrible éventualité, de plus en plus probable au fur et à mesure que le film avance, que Mason est l’assassin. Un film qui donne froid dans le dos, construit comme un thriller policier, qui vous tiendra en haleine d’un bout à l’autre, jusqu’à ce que vous découvriez les véritables intentions du tueur. Un dénouement choc qui vous laissera sans voix!
« Pour moi, choisir les principaux protagonistes d’un documentaire, c’est comme attribuer les rôles dans un film de fiction. J’ai été acteur; j’ai une formation en théâtre. Je réalise des documentaires narratifs qui ressemblent souvent à des fictions. Quel que soit le film, j’ai pu me rendre compte que la caméra « aime » certaines personnes plus que d’autres, comme on se plaît à dire à Hollywood! » – John Kastner
Meurtre au sein de la famille, John Kastner, offert par l’Office national du film du Canada
NCR : non criminellement responsable
Alors que Meurtre au sein de la famille s’attarde sur l’identité du coupable et sur ses véritables motifs, NCR : non criminellement responsable se penche sur la réhabilitation d’un homme atteint de schizophrénie, qui lors d’un épisode de psychose poignarde une inconnue dans un centre commercial. Déclaré non criminellement responsable, Sean Clifton est admis au Centre de santé mentale de Brockville en Ontario. Le film nous entraîne dans les méandres de la schizophrénie et du quotidien d’un homme qui peu à peu apprend à vivre avec sa maladie et lutte pour retrouver une vie normale. Pour Sean, la route vers une nouvelle vie passe par la rédaction d’une lettre d’excuses à sa victime. Un film touchant, troublant, qui viendra peut-être à bout de vos préjugés sur les personnes atteintes de maladies mentales ayant commis des crimes violents.
NCR : non criminellement responsable, John Kastner, offert par l’Office national du film du Canada
Loin d’eux-mêmes, loin des autres
L’accès sans précédent aux patients et au personnel du Centre de santé mentale de Brockville a permis à John Kastner de raconter l’histoire de Sean Clifton. Il en tire également un autre documentaire, Loin d’eux-mêmes, loin des autres, couronné meilleur long métrage documentaire canadien au Festival canadien du documentaire international Hot Docs, et maintenant offert en exclusivité sur ONF.ca. Le film raconte dix-huit mois dans la vie du centre de Brockville et de quatre patients, Carole, Justine, Sal et Michael, tous condamnés pour des crimes violents. À travers des entrevues avec les psychiatres, les intervenants et les patients eux-mêmes, qui se livrent avec une étonnante facilité au cinéaste, le film nous fait découvrir le quotidien de ceux dont l’histoire fait d’abord la manchette des faits divers dont, par la suite, on n’entend jamais plus parler. Un réveil brutal, un traitement choc qui nous questionne sur notre volonté et notre capacité à réintégrer ces personnes dans la société.
« Comment je parviens à tisser des liens si étroits avec les gens et pourquoi me confient-ils leurs secrets? Eh bien, je suis une personne non conformiste. Je tiens cela de ma défunte mère Rose qui était ma productrice déléguée pour l’émission de télévision The Fifth Estate. Ensemble, nous avons remporté deux prix Emmy. Elle aimait les gens, et nombreux étaient ceux qui s’ouvraient à elle, lui faisaient part de leur douleur morale. Elle m’a appris que pour faire des films, il faut être un être humain bienveillant avant d’être un réalisateur ou un journaliste. J’aime mon film, mais ce n’est qu’un film.” – John Kastner
Loin d’eux-mêmes, loin des autres, John Kastner, offert par l’Office national du film du Canada