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Vendredi cinéma : <em><strong>Les mains nettes</strong></em>

Vendredi cinéma : Les mains nettes

Vendredi cinéma : Les mains nettes

Par Marc St-Pierre, analyste, collection

Une série devenue long métrage
Ce vendredi, à la une d’ONF.ca, nous vous proposons Les mains nettes, un long métrage de fiction réalisé par Claude Jutra. À l’origine, le film n’était pas un long métrage, mais une série de 4 épisodes de 30 minutes. Produite et scénarisée par Fernand Dansereau, la série fut présentée les vendredis soirs sur les ondes de Radio-Canada à partir du 22 mars 1958. Elle connut un tel succès au petit écran que les responsables de la distribution, tout de suite après sa diffusion, eurent l’idée de la rendre accessible à un plus large public. Toutefois, une distribution dans un format de 4 épisodes était difficilement envisageable pour les marchés autres que la télévision. On considéra d’abord de remonter la série en une version d’une heure, mais c’était couper de moitié le contenu de la série! On s’entendit finalement pour une version de 73 minutes. C’est celle-ci que nous vous présentons sur le site.

Panoramique
Au-delà de l’anecdote de la durée et de la distribution du film, il est intéressant de noter que Les mains nettes fait partie d’un plus vaste projet, la série Panoramique. De 1957 à 1959, les cinéastes de l’équipe française de l’ONF vont proposer aux téléspectateurs de Radio-Canada un ensemble de films à épisodes de 30 minutes : Les Brûlés (1957) – 8 épisodes sur la colonisation de l’Abitibi, Le maître du Pérou (1958) – 3 épisodes sur l’agriculture et le monde rural, Pays neuf (1958) – 2 épisodes sur l’esprit d’entrepreneur des Canadiens français, Les mains nettes (1958) – 4 épisodes sur l’univers des collets blancs, Les 90 jours (1959) – 5 épisodes sur les grèves et les luttes ouvrières, Il était une guerre (1959) – 5 épisodes sur les Canadiens français et la Deuxième Guerre mondiale.

Un projet ambitieux
Avec ses 6 films et ses 27 épisodes, Panoramique est certes un projet ambitieux pour l’équipe de production française, qui, jusque là, s’était uniquement attaquée à des sujets de 30 minutes. C’est aussi une série avec une ligne directrice forte, qui s’adresse au spectateur canadien-français, car elle propose une réflexion sur quelques aspects de l’histoire sociale du Québec des années 1930 à la fin des années 1950. Ce qui, à l’époque, est tout à fait nouveau. En effet, les séries antérieures n’ont pas réellement de fil conducteur et ne sont pas nécessairement faites pour les téléspectateurs francophones. Sur le vif (1954-1955), la première série, présente des reportages de 15 minutes sur divers sujets au Canada et en Europe. Passe-partout (1955-1957), la série suivante, propose des documentaires et des fictions de 30 minutes, souvent adaptés de productions originales anglaises, sur de multiples sujets, qui n’ont pas nécessairement de lien entre eux. Panoramique est donc une série avec un fil conducteur fort, faite par et pour les Canadiens français.

Un terrain propice à l’expérimentation
La série change aussi les habitudes de production pour la télévision en proposant des films de plusieurs épisodes. C’est aussi l’occasion pour les cinéastes francophones de l’ONF de s’attaquer à des productions de plus d’une demi-heure. Sans conteste, Panoramique prépare le terrain pour la réalisation de longs métrages de fiction. Des cinéastes, comme Fernand Dansereau et Claude Jutra, s’y feront la main et réaliseront par la suite, à l’ONF ou dans le privé, de longues fictions. La série est également l’occasion d’expérimenter de nouvelles techniques de tournage, utilisées plus tard dans les films de cinéma direct. À titre d’exemple, nous pouvons mentionner que Les mains nettes fut entièrement tourné avec la lumière ambiante; ce qui, à l’époque, est quasiment impensable! La manière de faire du moment misait beaucoup sur la beauté de l’image, et les films, qu’ils fussent documentaires ou de fiction, devaient être tournés avec un éclairage soigné. Pourtant, Claude Jutra et Michel Brault, caméraman et directeur photo, choisirent d’utiliser l’éclairage ambiant afin de mieux rendre l’ambiance des bureaux, fréquentés par les personnages du film.

Je vous invite donc à visionner Les mains nettes dans sa version de 73 minutes. Si la série Panoramique vous intéresse, les films Les Brûlés (1957), Pays neuf (1958) et Il était une guerre (1959), remontés en long métrage, sont également accessibles sur le site.

Les mains nettes, Claude Jutra, offert par l’Office national du film du Canada

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